Nouvelle Orléans, Louisiane- Chez les plus de 70 ans à risque cardio-vasculaire intermédiaire, un traitement d’une durée moyenne de 5,6 ans par statine n’impacte pas négativement les capacités cognitives, un résultat rassurant. Mais une thérapie antihypertensive ne les améliore pas non plus, ce qui est décevant. Les résultats de l’étude HOPE-3 (Heart Outcomes Prevention Evaluation-3) ont été présentés en conférence de presse avant leur divulgation complète lors d’une session sur les essais cliniques du congrès de l’American Heart Association (AHA 2016).
Pour le Dr Jackie Bosch (Hamilton, Etats-Unis) interrogée par Heartwire, « ces résultats devraient calmer la polémique sur la possible apparition de trouble cognitifs chez les patients sous statines. La FDA et l’agence du médicament britannique (MHRA) ont fait inscrire sur les boites de statines un message en ce sens en se fondant seulement sur des données observationnelles post-marketing, alors même qu’aucune étude randomisés n’avait conclu en ce sens…Notre travail prouve que ces médicaments n’ont aucun effet sur la cognition ».
Pour le Dr Mark Creager, porte-parole de l’AHA « cette étude, si elle innocente les statines dans l’apparition de troubles cognitifs, n’a pas permis de montrer que la baisse de la pression artérielle permet de prévenir ce type de troubles ».
Ces résultats devraient calmer la polémique sur la possible apparition de trouble cognitifs chez les patients sous statines.
Dr Jackie Bosch
Concernant le traitement antihypertensif, le Dr Ralph Sacco (Miami, Floride) a ajouté, en conférence de presse, que « ce travail suggère que nous devons probablement traiter les patients à haut risque de façon précoce et pendant une durée plus longue avant d’observer un bénéfice potentiel sur les capacités cognitives. Cela conduit également à prendre en charge un nombre plus important d’hypertendus et ce, de façon précoce, afin d’anticiper la survenue de complications graves telles que les AVC mais aussi le déclin cognitif qui est habituel dans cette population», a ajouté le Dr Creager.
Evaluation des bénéfices cardio-vasculaire puis des fonctions cognitives après 70 ans
L’étude HOPE-3 a randomisé en quatre bras des patients à risque intermédiaire sélectionnés dans 228 centres répartis dans 21 pays :
Le traitement antihypertenseur seul a permis de faire baisser le risque d’évènements cardio-vasculaires de 24 %. La baisse a été de 25 % avec les statines. Pour le Dr Bosch, « cette étude montre que tous les patients à risque intermédiaire gagnent à être traités. La rosuvastatine est une option thérapeutique à reconsidérer dans cette population puisque l’étude HOPE-3 montre qu’elle permet de faire baisser de 24 % le risque d’évènements cardio-vasculaires, et ce n’est pas rien ».
Analyse comparative de la cognition chez les plus de 70 ans
Une analyse de l’impact des traitements sur la cognition a été menée à la suite des premiers résultats sur le risque global.
A l’inclusion et à la sortie de l’étude HOPE-3, tous les patients de plus de 70 ans – soit 1 626 sur les 3 086 hommes et femmes de l’étude - ont répondu à des tests cognitifs. Les participants de l’étude étaient âgés en moyenne de 74 ans, les femmes étaient plus représentées (59 %), la pression artérielle moyenne s’établissait à 140/79 mg Hg et le LDL cholestérol à 127 mg/dL.
Le traitement a permis en moyenne de faire baisser la pression artérielle de 6/2,9 mm Hg et le LDL cholestérol de 24,9 mg/dL.
En revanche, aucun effet n’a été noté dans les 4 bras sur les capacités cognitives.
Les résultats sont meilleurs chez les patients traités mais ils n’atteignent pas le seuil de significativité (p=0,04).
Pour le Dr Bosch, le choix du test DSST (digit-symbol substitution task) – l’un des trois tests cognitifs utilisés – pourrait avoir eu un impact sur les résultats : en effet, il s’agit d’une composante du test de QI de Wechsler qui mesure la capacité à penser rapidement, ce qui pourrait avoir induit un stress chez les participants.
Le Dr Creager ajoute, « ces résultats ne vont pas modifier ma pratique clinique : les statines, telles qu’elles sont actuellement recommandées, sont des médicaments particulièrement efficaces qui ont contribué à faire baisser la survenue des évènements cardio-vasculaires et des décès. Ils vont juste me donner des arguments à développer face aux patients qui craignent un impact de ce traitement sur leurs capacités cognitives ».
L’étude a été financée par le Canadian Institute of Health Research et par AstraZeneca.
Le Dr Bosch ne signale pas de conflits d’intérêt. |